Veille juridique du 13 octobre 2025

L’arrêté du 6 octobre 2025, modifiant l’arrêté S21, vient mettre le texte en cohérence avec le lancement des premiers appels d’offres simplifiés (« AOS »).

Il précise notamment que les installations éligibles à l’obligation d’achat sont celles « implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière, utilisant l’énergie solaire, d’une puissance crête installée dont la somme de la puissance crête de l’installation P et de la puissance de site Q (…) est inférieure ou égale à 100 kilowatts » (cf. rapport du projet de texte).

La Commission de régulation de l’énergie a publié le 6 octobre la nouvelle grille tarifaire applicable du 1er octobre 2025 au 1er janvier 2026 sur le segment de puissance 9 à 100 kWc.

Vente en totalité :

  • 10, 49 c€/kWh pour les installations comprises entre 9 et 36 kWc ;
  • 9,12 c€/kWh pour les installations comprises entre 36 et 100 kWc.

Vente en surplus :

  • 4 c€/kWh pour les installations inférieures 9 kWc ;
  • 6,17 c€/kWh pour les installations comprises entre 9 à 100 kWc.

Prime à l’investissement :

  • 0,16 €/Wc pour les installations comprises entre 9 et 36 kWc ;
  • 0,08 €/Wc pour les installations inférieures à 9 kWc, et comprises entre 36 et 100 kWc.

Dans le prolongement de la note publiée début octobre relative au passage au pas de temps de 15 minutes des contrats de complément de rémunération (cf. notre veille du 6 octobre), la Direction générale de l’énergie et du climat (« DGEC ») a publié une nouvelle note d’instruction, le 9 octobre, précisant le traitement des arrondis au sein du calcul de la moyenne des prix.

La DGEC précise que le prix de marché de référence pour une heure ronde est égal à la moyenne simple, non arrondie, du prix de clearing publié arrondi en euros à deux décimales sur la plateforme de marché organisé français de l’électricité pour livraison le lendemain, pour les quatre quarts d’heures qui la composent.

Veille juridique du 6 octobre 2025

Depuis le 1er octobre 2025, le marché de gros de l’électricité (segment day-ahead ou J-1) est passé d’un système d’enchères à l’heure à un système d’enchères au pas de temps 15 minutes.

La Direction générale de l’énergie et du climat (« DGEC ») a publié une note d’instruction précisant l’adaptation des contrats de complément de rémunération, initialement définis sur une base horaire, à ce nouveau cadre.

Le prix de marché de référence pour une heure est désormais calculé comme la moyenne arithmétique des quatre prix de clearing de chaque quart d’heure composant l’heure concernée.

Cette solution transitoire s’applique aux contrats de complément de rémunération existants, tant pour le versement du complément de rémunération que pour la prime de prix négatif. Elle pourra être amenée à évoluer avec la publication de l’arrêté fixant le régime définitif de prise en compte du pas de temps 15 minutes.

Quand le législateur défait ce qu’il avait construit

Dix ans après la loi NOTRe, qui avait amorcé le transfert obligatoire des compétences « eau » et «assainissement», les parlementaires reviennent sur cette obligation, à seulement sept mois de son échéance.

La loi NOTRe du 7 aout 2015 avait instauré une obligation de transfert des compétences « eau » et «assainissement» des communes vers les communautés de communes et les communautés d’agglomération.
Le transfert des compétences aux communautés d’agglomération est devenu obligatoire le 1er janvier 2020 mais s’agissant des communautés de communes, la loi du 3 août 2018 avait introduit un mécanisme permettant aux communes de reporter le transfert au 1er janvier 2026.
Le 9 octobre 2024, le Premier Ministre annonçait devant le Sénat la fin de ce transfert obligatoire au 1er janvier 2026.

[…]

Revue accessible aux abonnés

Pour en savoir plus :

https://www.environnement-magazine.fr/abo/kiosque.php?mag=hyd

Règlementaire – Revalorisation du bonus écologique pour certaines voitures électriques « d’origine » européenne

Le 8 septembre 2025, le Gouvernement français a annoncé une augmentation du bonus écologique octroyé pour l’achat d’un véhicule particulier électrique.

A compter du 1er octobre 2025, une prime complémentaire de 1 000 euros pourra ainsi venir s’ajouter au bonus écologique initial dans le cadre de la transition vers une mobilité plus durable.

Cette revalorisation ciblée est conditionnée par la satisfaction cumulative de deux critères d’éligibilité relatifs à l’origine des véhicules et de leurs composants essentiels. La première condition tend à l’assemblage du véhicule : ce dernier devra impérativement avoir été assemblé sur le territoire européen. Quant à la seconde condition, elle impose que le véhicule soit équipé d’une batterie produite en Europe.

Seuls les modèles respectant simultanément ces deux impératifs géographiques pourront prétendre à cette prime supplémentaire, marquant une préférence européenne claire face à la concurrence internationale.

La liste des modèles éligibles sera publiée et régulièrement mise à jour sur le site internet de l’ADEME afin de déterminer de manière précise les véhicules éligibles à la nouvelle prime.

Grâce à cette revalorisation, le bonus écologique pourra désormais atteindre la somme de 5 200 euros, sous réserve des conditions de ressources applicables aux ménages.

Au-delà du soutien financier au pouvoir d’achat des ménages français dans l’acquisition de véhicules à faibles émissions, cette mesure poursuit des objectifs stratégiques plus larges : la réindustrialisation locale, le renforcement de la souveraineté économique et énergétique européenne et l’accélération de la décarbonation du secteur des transports.

Cette initiative s’inscrit en complémentarité avec le dispositif des Certificats d’Économies d’Énergie (CEE), dont l’application a débuté le 1er juillet 2025. La synergie entre ces deux mécanismes renforce l’arsenal des mesures gouvernementales en faveur de la transition énergétique et vise à créer un cadre incitatif orientant les consommateurs vers des choix plus écologiques et responsables. 

Règlementaire – La Commission Européenne adopte un nouvel encadrement en matière d’aides d’État en faveur de l’industrie propre

Après avoir consulté les États membres et les parties prenantes, et tenu compte de toutes les contributions reçues, la Commission européenne a adopté le 25 juin 2025[1] un nouvel encadrement en matière d’aides d’État à l’appui du pacte pour une industrie propre, afin de permettre aux États membres de promouvoir le développement de l’énergie propre, la décarbonation de l’industrie et les technologies propres.

Ce nouvel encadrement a notamment pour ambitions un soutien flexible aux investissements dans toutes les technologies conduisant à la décarbonation ou permettant une efficacité énergétique accrue.

L’encadrement simplifie les règles en matière d’aides d’État dans cinq domaines principaux, à savoir :

  1. Une procédure accélérée pour le déploiement des énergies renouvelables, mais aussi des combustibles bas carbone, tels que l’hydrogène vert et bleu, qui jouent également un rôle essentiel dans la réduction des émissions (ils soutiennent notamment la transition des entreprises dans les secteurs difficiles à décarboner, où il n’existe pas encore d’options viables plus économes en énergie ou en coûts) ;
  2. la réduction temporaire des prix de l’électricité en faveur des gros consommateurs d’énergie afin d’assurer la transition vers une électricité propre à bas coût ;
  3. la décarbonation des installations de production existantes ;
  4. le développement de capacités de production de technologies propres dans l’UE via un large éventail de technologies de décarbonation, telles que l’électrification, l’hydrogène, la biomasse, ainsi que le captage, l’utilisation et le stockage du carbone ; et
  5. la réduction des risques liés aux investissements dans les énergies propres, la décarbonation, les technologies propres, les projets d’infrastructures énergétiques et les projets soutenant l’économie circulaire.

L’encadrement des aides d’État à l’appui du pacte pour une industrie propre sera applicable jusqu’au 31 décembre 2030, ce qui offre aux États membres et aux entreprises une prévisibilité à long terme. Il remplace l’encadrement temporaire de crise et de transition, en vigueur depuis 2022.

Ce nouvel encadrement des aides d’Etat a suscité des réactions contrastées. Ainsi, l’ONG Transports & Environment a déclaré qu’il s’agissait d’un « revers » pour l’industrie européenne des batteries car la Commission n’était pas allée assez loin et venait de manquer une occasion unique de gagner en souveraineté dans le domaine des batteries pour voitures électriques.

Il a notamment été relevé qu’alors que l’ambition était de faire face à la concurrence américaine et chinoise, la Commission européenne avait décidé d’exclure les aides à la production, pourtant jugées essentielles par de nombreux acteurs du secteur. L’UE se démarque ainsi des USA qui, avec l’Inflation Reduction Act (IRA), offrent des subventions simples et massives pour chaque unité produite, et ont ainsi attiré plusieurs gigafactories.

Le calendrier de mise en place de ce nouvel encadrement est aussi pointé. La crainte est en effet que lorsque ces mesures de soutien deviendront pleinement opérationnelles, c’est-à-dire en 2028, la plupart des acteurs européens dans le domaine des batteries aient entre temps « jeté l’éponge » …


[1] Communiqué de presse de la CE (dont cette brève reprend des extraits) : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_25_1598

Airbags TAKATA – Point d’étape sur les obligations mises à la charge des constructeurs

Le 29 juillet 2025, un Arrêté imposant des mesures restrictives provisoires concernant les véhicules équipés d’airbags Takata et modifiant l’arrêté du 9 avril 2025 a été adopté[1]. Il a ensuite été précisé par un Arrêté du 5 septembre 2025[2].

Ce nouvel Arrêté sur le sujet Takata alourdit les obligations mises à la charge des constructeurs et les astreintes encourues en cas de retard dans la mise en œuvre de ces obligations.

Ainsi les obligations de mise en œuvre des mesures de stop-drive sont renforcées, le champ d’application de l’Arrêté est élargi à de nouveaux types d’airbags Takata, les obligations de déclarations par les constructeurs auprès du SSMVM sont intensifiées.

De même, les obligations de communication à la charge des constructeurs sont alourdies, avec notamment l’obligation d’allouer à un plan de communication, chaque trimestre, un budget de 5 € / véhicule visé par une campagne de stop drive, dans la limite de 1% du chiffre d’affaires annuel du constructeur en France.

Davantage d’informations, très techniques pour certaines, doivent par ailleurs être mise à disposition du public.

L’obligation d’un suivi centralisé des dossiers par le constructeur est en outre maintenue.

Enfin, des engagements minimums à l’égard des clients sont imposés au constructeur dans le process de remplacement des airbags : rendez-vous proposé sous 2 mois, délai moyen de remplacement inférieur à 21 jours, proposition systématique d’un véhicule de courtoisie, d’un remplacement à domicile ou d’une prise en charge du transport…

Le délai de recours contre cet Arrêté a expiré ce 30 septembre 2025. Certains constructeurs ont fait le choix d’un recours gracieux avant même l’application de sanctions par l’Administration.

Reste donc désormais à voir quelle suite sera donnée à ces recours et dans quelle mesure l’Administration entend mettre en application les astreintes annoncées pour les constructeurs défaillants, nonobstant le caractère potentiellement disproportionné de certaines obligations et, en tout état de cause, du montant des astreintes.


[1] Arrêté du 29 juillet 2025 publié au JORF n°0175 du 30 juillet 2025

[2] Arrêté du 5 septembre 2025 modifiant l’arrêté du 9 avril 2025 imposant des mesures restrictives provisoires concernant les véhicules équipés d’airbags Takata publié au JORF n°0207 du 6 septembre 2025

Distribution – La CJUE clarifie la notion d’accord s’agissant de l’interdiction des ventes actives dans un territoire alloué exclusivement à un distributeur

La CJUE a rendu le 8 mai 2025 un arrêt [1] qui fait suite à une question préjudicielle posée par la Cour d’appel d’Anvers dans le cadre d’un litige concernant le respect de l’interdiction des ventes actives dans un territoire alloué exclusivement à un distributeur.

En l’occurrence, un accord de distribution exclusive avait été conclu en 1993 entre le producteur néerlandais de fromage C. et son distributeur exclusif pour la Belgique et le Luxembourg, B.K. Ce dernier reprochait à un autre opérateur, A.H, qui achète du fromage à C. pour le commercialiser sur des marchés situés en dehors de la Belgique et du Luxembourg, de porter atteinte à ses droits exclusifs en Belgique en y procédant à des ventes actives.

Par principe, lorsqu’un fournisseur accorde une exclusivité territoriale à un distributeur, il lui appartient de protéger ce distributeur contre les ventes actives de ses autres acheteurs, autrement dit de lui garantir l’effectivité de son exclusivité territoriale (c’est la condition dite de l’« obligation parallèle »), la restriction sur les ventes actives étant alors couverte par l’article 4, b), i) du règlement n° 330/2010 et bénéficiant de l’exemption catégorielle.

Encore faut-il qu’il soit établi que le fournisseur a fait le nécessaire pour que cette protection du distributeur exclusif soit effective. Cette preuve doit-elle tenir dans un accord, tacite ou explicite, entre le fournisseur et les (autres) distributeurs, ou résulte-t-elle de la seule constatation que, de facto, les autres distributeurs de ce fournisseur ne se livrent pas à des ventes actives sur le territoire du distributeur exclusif ? Tel était l’objet de la question préjudicielle posée par la Cour d’appel d’Anvers.

La Cour rappelle que la question de la preuve de l’existence d’un « accord », au sens de l’article 101, § 1, TFUE, relève de l’ordre juridique interne de chaque État membre, sous réserve du respect des principes d’équivalence et d’effectivité (pt. 44). L’existence d’un tel « accord » peut être établie non seulement au moyen de preuves directes, mais également sur la base d’indices objectifs et concordants démontrant 1) que le fournisseur a invité ses distributeurs à ne pas réaliser de telles ventes sur ce territoire, et 2) que ces derniers ont, de facto, répondu à cette invitation (pt. 46).

Au cas d’espèce, les contrats de distribution conclus entre C. et ses distributeurs ne contenaient aucune clause interdisant aux distributeurs de pratiquer des ventes actives sur le territoire exclusif alloué à B.K. Il fallait donc examiner tous indices objectifs et concordants permettant d’établir si C. avait, ou n’avait pas, invité ses distributeurs à ne pas se livrer à des ventes actives sur le territoire exclusif alloué à B.K, et que ces distributeurs avaient, ou n’avaient pas, tacitement ou expressément acquiescé à l’éventuelle invitation de ce fournisseur (pts. 47-50).

A l’issue de son examen, la Cour dit pour droit que la seule constatation que tous les autres distributeurs, à l’exception du distributeur mis en cause (A.H), ne se livrent pas à des ventes actives sur le territoire exclusif n’est pas suffisante pour établir l’existence d’un « accord », au sens de l’article 101 TFUE, en ce qu’elle ne permet d’établir ni l’invitation du fournisseur ni l’acquiescement des autres distributeurs.


[1] Affaire C-581/23 (Beevers Kaas)

Responsabilité Produit – Actions judiciaires en résiliation de vente contre Tesla

Le constructeur Américain de voitures électriques Tesla, déjà confronté depuis plusieurs mois à une chute brutale de ses ventes dans le monde, pourrait voir naître contre lui un deuxième revers.

Le 11 juin 2025, une dizaine d’assignations en justice ont été déposées auprès du Greffe du Tribunal des Activités Economiques de Paris, à l’encontre de Tesla France et le siège aux Etats-Unis.

Les multiples dérapages du dirigeant Elon Musk, d’abord proche du nouveau Président américain Donald Trump, puis séparé de ce dernier dans un cadre d’invectives à travers les réseaux sociaux, semblent avoir eu des conséquences sur les utilisateurs. Victimes d’insultes, de menaces, et de dégradation sur leur véhicule, les clients de la marque ne sont plus en mesure d’utiliser paisiblement le produit qu’ils ont acquis.

Et c’est précisément le fondement juridique de l’action initiée par ces justiciables : le droit à la jouissance paisible. En effet, l’article 1625 du Code civil dispose notamment : « La garantie que le vendeur doit à l’acquéreur a deux objets : le premier est la possession paisible de la chose vendue ; (…) »

Les clients réclament ainsi la résiliation de leur contrat de location, ceci comprenant le remboursement des mensualités déjà versées. Par ailleurs, les clients ayant subi des dégradations sur leur véhicule demandent l’octroi de dommages et intérêts.

Il est permis de s’interroger si ce mouvement judiciaire prendra de l’ampleur, notamment aux Etats-Unis, où un procès peut coûter très cher à celui qui le perd.

Automobile – Sous la pression des industriels du secteur, la Commission européenne s’engage dans une démarche d’assouplissement des calendriers et objectifs de décarbonation

La Commission européenne a ouvert le 7 juillet 2025 un appel à contributions en vue de la révision du règlement établissant les normes d’émissions de CO2 pour les voitures et les véhicules utilitaires neufs. La période ouverte pour contributions s’achèvera le 10 octobre 2025. Un résumé de tous les avis sera communiqué huit semaines après la clôture de la période et devrait donc intervenir vers le début du mois de novembre 2025. L’objectif est l’adoption d’un nouveau Règlement par la Commission pour le 2ème trimestre 2026.

Cet appel à contribution est ainsi résumé dans la communication de la CE : « Les règles de l’UE relatives aux normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures et camionnettes neuves constituent une politique clé pour réduire les émissions de CO2 du transport routier et atteindre les objectifs climatiques de l’Union. Cette initiative révisera les règles actuelles, sur la base d’une analyse factuelle, en tenant compte de toutes les évolutions technologiques pertinentes et de l’importance d’une transition économiquement viable et socialement équitable vers une mobilité zéro émission ».

Cette initiative de la CE a fait suite aux alertes des industriels du secteur automobile qui considéraient comme impossible le respect des normes d’émissions de CO2, notamment pour les véhicules utilitaires. Le patron Europe du Groupe Stellantis, J.P Imparato, annonçait ainsi être « à quelques mois d’un drame ».

La pression de l’industrie a ensuite conduit la Commission européenne à annoncer, le 12 septembre 2025, par la voix de sa Présidente Ursula Von der Leyen, que des aménagements pourraient être concédés aux constructeurs qui jugent intenable l’échéance à 2035 pour le « zéro émission ».  La Commission européenne voudrait notamment avancer la clause de revoyure prévue pour 2026 concernant le passage au tout-électrique sur le marché du véhicule neuf en 2035.

Procédure civile : La refonte de l’instruction conventionnelle et des modes amiables de résolution des différends

Le Décret n° 2025-660 du 18 juillet 2025 (dans sa version rectifiée du 23 août), qui est entré en vigueur ce 1er septembre 2025, opère une refonte des dispositions relatives à l’instruction conventionnelle et aux Modes Amiables de Résolution des Différends (MARD), dans le but de promouvoir une approche encore plus contractuelle et collaborative du procès civil.

Il s’applique aux instances en cours au 1er septembre, à l’exception des dispositions relatives aux conventions de mise en état, applicables aux seules instances introduites à compter du 1er septembre.

I- Une approche plus collaborative du procès civil

    Cette nouvelle approche a conduit à une réécriture de l’article 21 du Code de Procédure Civile (ci-après « CPC ») pour y introduire un principe directeur de coopération en ces termes :

    « Il entre dans la mission du juge de concilier les parties et de déterminer avec elles le mode de résolution du litige le plus adapté. Les parties peuvent à tout moment convenir de résoudre à l’amiable tout ou partie du litige ».

    L’article 3 du décret consacre ainsi un changement de paradigme procédural, en érigeant l’instruction conventionnelle en principe et l’instruction judiciaire en exception.

    Il en résulte que les affaires doivent en principe être instruites conventionnellement entre les parties, et ce n’est qu’à défaut qu’elles seront instruites judiciairement. Les affaires instruites conventionnellement feront l’objet d’un audiencement prioritaire.

    Afin de mettre en œuvre cette nouvelle approche, la procédure participative qui permet aux parties d’organiser conventionnellement la mise en état de leur affaire est simplifiée. Une voie de mise en état conventionnelle simplifiée et moins formelle est par ailleurs instaurée.

    • Simplification de la procédure participative aux fins de mise en état

    Le régime de la procédure participative aux fins de mise en état[1] est assoupli : les actes d’instruction n’ont plus besoin d’être systématiquement contresignés par avocat, la convention interrompt le délai de péremption de l’instance[2] et, en appel, interrompt les délais de procédure impératifs. Enfin, la procédure participative ne dessaisit plus le juge, qui peut notamment statuer sur des exceptions de procédure ou prononcer des mesures provisoires[3].

    • Introduction de l’instruction conventionnelle

    Cette nouvelle procédure au formalisme allégé est instaurée par le Décret : elle ne requiert pas un acte contresigné par avocats, elle peut se matérialiser par de simples conclusions concordantes des avocats ou par une copie de la convention adressées au juge[4], la conclusion d’une telle convention ne nécessitant pas obligatoirement que les parties soient représentées par un avocat[5]. Cette souplesse vise à favoriser son usage, en particulier dans les dossiers où une mise en état lourde et détaillée ne se justifie pas.

    L’intérêt d’une telle convention est double : d’une part, elle interrompt le délai de péremption de l’instance[6], d’autre part, elle offre aux parties une flexibilité accrue dans la définition de leur calendrier procédural. Le juge n’est pas totalement dessaisi pour autant : il conserve un rôle de supervision, pouvant intervenir pour régler les incidents, statuer sur les fins de non-recevoir ou encore ordonner des mesures provisoires[7]. Si toutefois la convention compromet les principes directeurs du procès, le droit à un procès équitable, ou bien si elle ne permet pas de mettre l’affaire en état, le juge, d’office ou à la demande, peut reprendre l’instruction judiciaire[8].

    II- La place de l’amiable renforcée

    • La généralisation de l’audience de règlement amiable (ARA)

    L’article 17 du Décret a refondu entièrement le livre V du Code de Procédure Civile en y regroupant l’ensemble des règles relatives aux modes de résolution amiable des différends, tant conventionnels que judiciaires, à des fins de clarté et de lisibilité.

    L’une des conséquences directes de cette recodification est la généralisation de l’audience de règlement amiable à toutes les juridictions de l’ordre judiciaire, à l’exception des juridictions prud’homales, alors que jusqu’ici l’ARA n’était applicable qu’à certaines procédures devant le tribunal judiciaire ou le tribunal de commerce.

    La convocation à une audience de règlement amiable peut être prononcée par le juge saisi de l’affaire ou par le juge chargé de l’instruction, à la demande de l’une des parties ou d’office[9].

    La convocation à une ARA interrompt le délai de péremption de l’instance[10], et en appel, interrompt les délais impératifs[11].

    • La généralisation de l’injonction de rencontrer un médiateur

    Le Décret renforce le dispositif d’injonction de rencontrer un médiateur ou un conciliateur prononcé par le juge[12]. Le juge peut, à tout moment de l’instance, y compris en référé, ordonner cette rencontre, qui prend la forme d’une réunion d’information sur la médiation ou la conciliation.

    L’une des nouveautés tient à la sanction introduite par le texte.  Selon le nouvel article 1533-3 du CPC, le médiateur ou le conciliateur informe le juge de l’absence d’une partie à la réunion, cette dernière pouvant alors être condamnée à une amende civile pouvant atteindre 10 000 euros, sauf à justifier son absence par un motif légitime. Le nouvel article 1533-1 du CPC précise à ce titre que le principe de confidentialité ne couvre pas l’information relative à la présence ou l’absence des parties à la réunion.

    • La confidentialité des modes alternatifs de règlement des différends

    Une autre innovation notable du Décret porte sur le périmètre du principe de confidentialité dans les modes de résolutions amiables.

    Le nouvel article 1528-3 du CPC précise que, sauf accord contraire des parties, la règle de la confidentialité s’applique à tout ce qui est dit, écrit ou fait lors de l’audience de règlement amiable, ainsi qu’aux pièces « élaborées dans le cadre des processus amiables ».

    Néanmoins, il est précisé au même article que les pièces produites au cours de l’audience de règlement amiable, de la conciliation confiée à un conciliateur de justice ou de la médiation ne sont pas couvertes par la confidentialité.

    • Un allongement des délais en médiation et conciliation judiciaire

    Le nouvel article 1534-4 du CPC rallonge les délais du processus de médiation judiciaire.  La durée initiale de la conciliation ou de la médiation ne peut dorénavant excéder 5 mois (contre 4 auparavant), et un prolongement de 3 mois de la mission pourra être accordé à la demande du conciliateur ou du médiateur.

    • Le recours à un technicien

    L’un des objectifs du Décret est aussi de permettre le recours, par les parties, à un technicien au cours de l’instruction conventionnelle[13]. Pour ce faire, avant tout procès au fond ou une fois le juge saisi, les parties peuvent désigner d’un commun accord le technicien auxquelles elles souhaitent faire appel, et déterminer ses missions. Il convient de souligner à ce titre quatre nouveautés importantes :

    • le rapport réalisé par le technicien aura la même valeur qu’un avis rendu dans le cadre d’une mesure d’instruction ordonnée judiciairement (expertise judiciaire notamment), lorsque la convention ayant pour objet de recourir à un technicien est conclue entre avocats[14] ;
    • les parties disposeront d’un recours au juge en cas de difficulté relative à l’exécution de la convention[15] ; 
    • tout tiers intéressé pourra, avec l’accord des parties, être associé aux opérations menées par le technicien. Ledit tiers deviendra alors partie à la convention[16] ;
    • le technicien pourra exercer à la fois une mission d’expertise et une mission de médiation.
    • Homologation des accords amiables

    Le Décret harmonise et clarifie également le régime d’homologation des accords issus des MARD au sein du Titre IV du Livre 5.

    Selon l’article 1544 du CPC, il n’appartient au juge de n’exercer qu’un contrôle limité : il vérifie la licéité de l’objet de l’accord, et sa conformité à l’ordre public, et ne peut en aucun cas modifier les termes de l’accord. Cette approche permet de donner force exécutoire aux accords amiables dans des délais plus brefs, tout en préservant la liberté contractuelle des parties. L’homologation devient ainsi une étape simplifiée et sécurisée, consolidant la place centrale des MARD dans l’architecture du procès civil.

    Conclusion :

    Ce Décret opère une véritable mutation du procès civil, en plaçant l’amiable et l’instruction conventionnelle au cœur de la procédure. Il renforce la coopération entre juges et parties, tout en offrant des outils plus souples et efficaces pour accélérer la résolution des litiges. Reste désormais à observer comment ces nouvelles dispositions seront mises en œuvre concrètement dans la pratique.

    Co-rédacteur : Samuel Grassin


    [1] Art. 130 à 130-7 CPC

    [2] Art. 130-3 1° CPC

    [3] Art. 130-3 2° CPC

    [4] Art. 129-2 CPC

    [5] Circulaire du 19 juillet 2025, sur le décret portant réforme de l’instruction conventionnelle et recodification des modes amiables de règlement des différends.

    [6] Art. 129-3 1° CPC

    [7] Art. 129-3 2° CPC

    [8] Art. 129-2 CPC

    [9] Art. 1532

    [10] Art. 1532 CPC

    [11] Art. 915-3 CPC

    [12] Art. 1533 CPC

    [13] Art. 128 CPC et 131 à 131-8 CPC

    [14] Art. 131-8 CPC

    [15] Art. 131-3 CPC

    [16] Art. 131-6 CPC

    Concurrence – Ce qu’il faut retenir du rapport annuel 2024 de l’Autorité de la concurrence

    L’Autorité de la concurrence a publié son rapport annuel 2024, marquant une « année historique » selon les mots de son Président Benoît Cœuré, par l’ampleur des sanctions prononcées et le nombre record d’opérations de concentration examinées.

    En 2024, l’activité de l’Autorité est restée soutenue. Si l’activité contentieuse et consultative est en baisse par rapport à 2023 (11 décisions et 8 avis contre respectivement 16 décisions et 20 avis), le nombre de décisions de contrôle des concentrations a, quant à lui, fortement augmenté (295 contre 266 en 2023).

    Comme à l’accoutumée, le rapport s’ouvre sur l’édito de son Président, la présentation de son fonctionnement, et quelques chiffrés clés sur l’année écoulée.

    Cette année le rapport reproduit également le discours prononcé par Christine Lagarde, Présidente de la Banque Centrale Européenne, à l’occasion du 15e anniversaire de l’Autorité de la concurrence à Paris, le 5 novembre 2024.

    Le rapport présente ensuite successivement le bilan de l’année au regard de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles, du contrôle des concentrations et de sa mission consultative.

    S’agissant des pratiques anticoncurrentielles, le rapport souligne l’importance de lutter contre de telles pratiques pour « le maintien d’un marché équitable et innovant » et rappelle qu’en Europe, les pratiques anticoncurrentielles génèrent des hausses de prix moyennes de 17%.

    L’Autorité de la concurrence a prononcé 8 décisions de sanction en 2024 pour un montant total de plus de 1,4 milliard d’euros, établissant ainsi un montant record d’amendes (le précédent record datant de 2015 avec 1,13 milliard d’euros d’amendes). 

    Ce montant est constitué principalement de 3 affaires :

    • La décision 24-D-03 du 15 mars 2024 sanctionnant les sociétés Alphabet Inc, Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France à 250 millions d’euros pour ne pas avoir respecté 4 des 7 engagements qui avaient été rendus obligatoires par l’Autorité dans sa décision 22-D-13 du 21 juin 2022 ;
    • La décision 24-D-09 du 29 octobre 2024 sanctionnant, pour un montant total de 470 millions d’euros, deux ententes verticales sur les prix entre fabricants et distributeurs dans le secteur du matériel électrique basse tension. La première entente a été mise en œuvre par la société Schneider Electric et ses distributeurs Rexel et Sonepar entre décembre 2012 et septembre 2018. La seconde a été mise en œuvre par la société Legrand et son distributeur Rexel de mai 2012 à septembre 2015 ;
    • La décision 24-D-11 du 19 décembre 2024 sanctionnant, pour un montant total de 611 millions d’euros, 12 ententes verticales sur les prix entre fabricants et distributeurs dans le secteur de la fabrication et de la commercialisation des produits de gros et de petit électroménager. Ces ententes ont été mises en œuvre entre février 2007 et décembre 2014 et avaient pour objectif de maintenir des prix de vente plus élevés, notamment face à l’émergence de distributeurs en ligne concurrents.

    S’agissant du contrôle des concentrations, en 2024 l’Autorité a examiné un nombre record de 295 opérations, soit une hausse de 10% par rapport au précédent pic de 2021 (272 opérations). Parmi les décisions d’autorisation, 8 décisions ont été rendues sous réserve de la mise en œuvre d’engagements proposés par les parties.

    Les secteurs contrôlés se répartissent comme suit :

    Source : Annexe du Rapport Annuel 2024, page 14

    La prédominance du secteur de la distribution s’explique par des seuils de contrôlabilité plus bas : la grande majorité des décisions en la matière (soit 122 décisions pour 2024) concerne le commerce de détail à dominante alimentaire et la distribution automobile.

    L’Autorité de la concurrence relève en particulier dans son rapport 5 décisions d’autorisation dans le secteur de la distribution alimentaire qui ont conduit au changement d’enseigne de 590 magasins :

    • 404 ex-Casino repris par Intermarché, Carrefour et Auchan ;
    • 186 ex-Louis Delhaize (Cora et Match) repris par Carrefour.

    Enfin au titre de son activité consultative, l’Autorité a rendu 8 avis en 2024.

    Le rapport se focalise plus particulièrement sur :

    • L’avis 25-A-01 du 9 janvier 2025 relatif aux systèmes de notation visant à informer les consommateurs sur les caractéristiques liées au développement durable des produits et des services de consommation, ces systèmes de notation étant en plein essor dans de nombreux secteurs ;
    • L’avis 24-A-05 du 28 juin 2024 relatif au fonctionnement concurrentiel du secteur de l’intelligence artificielle générative, secteur occupant une place centrale dans le débat public et économique du fait des questions soulevées en matière d’éthique ou encore à son impact sur le marché du travail et de la productivité.

    L’Autorité de la concurrence profite également de son rapport annuel pour faire le point sur son action en Outre-mer ces dernières années, relevant que « la question du pouvoir d’achat dans les territoires ultramarins constitue un enjeu majeur, marqué par des écarts de prix significatifs avec la métropole ». Ainsi, depuis 2008, l’Autorité a prononcé 231 millions d’euros d’amendes, rendu 46 décisions contentieuses et 80 décisions de contrôle des concentrations dans les territoires ultramarins. 

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